18 novembre 2020 Marie-Céline Terré

La santé psychologique des salariés français très nettement dégradée après neuf mois de pandémie

Etat psychologique, Risques Psychosociaux,

& Epuisement des Salariés Français

4ème vague du baromètre :

49% des salariés sont en situation de détresse psychologique (+7) dont 18% en détresse élevée (+1)

35% des salariés sont en état d’épuisement émotionnel sévère

5% des salariés (soit environ 1 million de personnes) sont en burnout sévère

24% des salariés ont déjà pris un arrêt maladie à cause du stress (soit environ 5,5 millions de personnes)

Paris le 18 novembre 2020 – Alors que la crise sanitaire et économique liée à la COVID 19 a profondément impacté la vie des salariés Français dans toutes ses dimensions, Empreinte Humaine (spécialiste en prévention des risques psychosociaux et en qualité de vie au travail) publie la 4ème vague de son « Baromètre de la santé psychologique des salariés Français en période de crise » réalisé par OpinionWay. Initié pendant le 1er confinement ce baromètre démontre indiscutablement le caractère autant psychosocial qu’épidémiologique de la crise.

Cette 4ème vague entend suivre l’évolution des indicateurs liés à la détresse psychologique, à la croissance post traumatique, et à la résilience des salariés. Elle permet enfin d’aborder de nouveaux indicateurs tels que le risque de burnout. Une fois de plus les résultats de cette étude dressent un panorama inquiétant de la santé psychologique des salariés à la suite de neuf mois d’épidémie. Les indicateurs se dégradent.

Ainsi, leur détresse psychologique[1] culmine à 49% (+7 par rapport à mai 2020) dont 18% en détresse psychologique élevée (+1) et 35% d’entre eux sont en état d’épuisement émotionnel sévère et environ 1 000 000 de salariés sont en burnout[2] sévère (soit 5%). 24% déclarent avoir déjà pris un arrêt de travail à cause du stress ou de l’anxiété (74% de détresse psychologique) soit environ 5 500 000 salariés.

« Ces résultats sont extrêmement préoccupants et montrent l’urgence d’agir. La crise sanitaire a pris de court toute la société, les entreprises y compris. Après 9 mois de crise, le monde du travail est majoritairement épuisé qu’il s’agisse des salariés ou des managers, tous indiquent un état alarmant » déclarent Christophe NGUYEN, psychologue du travail et président d’Empreinte Humaine, et Jean-Pierre BRUN, co-fondateur d’Empreinte Humaine et expert conseil.

L’état des salariés est très préoccupant

Si le déconfinement avait permis une baisse du taux de détresse psychologique des salariés, celui-ci repart très nettement à la hausse. Ainsi 49% des salariés (+7 par rapport à mai 2020) sont en situation de détresse psychologique dont 18% en détresse psychologique élevée (+1). Taux également en hausse très nette pour la hiérarchie avec 58% de détresse psychologique pour les managers (+10) dont 25% de détresse élevée (+4) et 72% (+6) pour les managers de managers.

Faisant suite à 9 mois de pandémie, la fatigue émotionnelle s’installe et le burnout touche de façon importante les salariés et en particulier les managers. 35% des salariés sont en état d’épuisement émotionnel sévère et 5% sont en burnout sévère soit environ 1 000 000 de personnes. Les managers eux, sont deux fois plus en burnout sévère que les non-managers.  Enfin, 24% des salariés déclarent avoir déjà pris un arrêt de travail à cause du stress ou de l’anxiété soit environ 5 500 000 salariés et 36% ont peur de ne pas pouvoir faire face psychologiquement à cette crise.

Le soutien perçu par les salariés dans l’entreprise augmente

Parallèlement, les salariés estiment être soutenus en premier lieu par leur collègue à 83% (+4) le N+1 à 77% (-5) leur direction à 70% (+5), devant la DRH à 67% (+11) et la médecine du travail à 58% (+14).  Pourtant, seulement 32% des salariés perçoivent leur direction d’entreprise comme engagée sur le sujet de la santé psychologique au travail soit -13 points par rapport à mai 2020, ce qui est très insuffisant.

« 50 % des entreprises ont mis en place des politiques ou des plans d’action de prévention des risques psychosociaux, incivilités, violences ou harcèlement au travail. C’est très positif, les intentions sont présentes, reste à mettre en place d’autres actions plus efficaces sur la question des risques psychosociaux. Je crains que l’état mental des salariés se dégrade avec le temps si des mesures de fond ne sont pas mises en œuvre. » ajoute Christophe NGUYEN

Les actions des entreprises doivent être renforcées en matière de sécurité psychologique

  • 35% pensent que la santé psychologique des salariés est aussi importante que la productivité dans leur entreprise (-2)
  • 42% indiquent que dans leur entreprise, la prévention du stress implique tous les niveaux hiérarchiques de l’organisation (-1)
  • 32% estiment qu’il y a un bon niveau de communication/information en ce qui concerne les enjeux liés à leur santé psychologique (-7)

« Les entreprises, le management et les salariés doivent savoir ce qu’est un climat de sécurité psychologique si on veut minimiser les effets de cette crise sanitaire sur la santé mentale des salariés et leurs dirigeants. Des efforts doivent être faits, la sécurité psychologique est indispensable pour la santé des salariés, ce n’est pas un luxe. Elle s’appuie sur des valeurs d’entreprise et des actions claires au premier desquelles l’engagement des comités de direction des entreprises dont on constate malheureusement une grande baisse par rapport à nos derniers baromètres. Les pouvoirs publics commencent à parler du sujet de la santé mentale, c’est bien, il faut maintenant aider les entreprises à investir sur le sujet. » déplore Christophe NGUYEN

Le rapport au travail et l’engagement des salariés en baisse nette

42% des salariés indiquent que leur travail leur plait moins qu’avant, 35% considèrent que la crise leur a fait comprendre que ce qu’ils faisaient n’avait pas de sens et 36% ont perdu de la fierté à travailler pour leur entreprise / organisation. Enfin 49% restent dans leur entreprise faute de trouver mieux, ce taux s’élève à 60% chez les salariés en 100% télétravail.

A la faveur de cette crise, les salariés formulent clairement des attentes vis-à-vis de leur entreprise en matière de qualité de vie au travail :

  • 74% pensent que leur entreprise doit être encore plus attentive à son rôle en matière écologique et social
  • 59% sont plus exigeants envers leur employeur pour prendre en compte le bien-être de ses salariés
  • 52% savent mieux ce qu’ils attendent de leur entreprise en matière de bien-être psychologique
  • 52% ont besoin que leur entreprise les aide à mieux appréhender psychologiquement leur travail

« Ces résultats invitent à requestionner l’efficacité des politiques de prévention des risques psychosociaux des entreprises. Celles qui ont fait des démarches de fond s’en sortent mieux que les autres. Dans tous les cas, de nouvelles attentes se créent envers l’entreprise. La crise est un révélateur de nouveaux risques psychosociaux et attentes en matière de bien-être au travail voire même du travail en lui-même. Ces nouveaux risques doivent amener à de nouvelles mesures de prévention et d’accompagnement. » commente Christophe NGUYEN

« Les entreprises qui hésitent à investir dans le sujet risquent d’en payer le prix plus tard, les salariés ne veulent plus travailler dans des environnements de travail qui menacent leur santé psychologique. » ajoute Jean-Pierre BRUN

Impact du télétravail sur la santé psychologique des salariés

Si 70% des télétravailleurs se sentent plus efficaces qu’en présentiel, il est néanmoins incontestable que plus le télétravail est important plus la détresse psychologique des salariés augmente : 58% des salariés en 100% télétravail sont en détresse psychologique contre 53% des salariés en situation hybride (mêlant distanciel et présentiel) et des salariés en présentiel total (47%). De plus, 68% des salariés interrogés constatent des inégalités entre les télétravailleurs (taille de résidence, enfants ou non, aisance sur les outils numériques…), 41% des télétravailleurs se sentent isolés à cause du télétravail et 55% pensent qu’il nuit au sentiment collectif des équipes.

50% des télétravailleurs peinent à oublier le travail après la journée et à trouver du répit et 50% considèrent et que les webcams sont une forme d’intrusion dans leur vie personnelle.

« Sur la durée, le télétravail peut créer de la détresse psychologique. Un tiers des télétravailleurs sature du télétravail.» poursuit Christophe NGUYEN

Un nouveau risque psychosocial : les incivilités numériques

Sept personnes sur dix constatent que pendant les réunions à distance, les participants n’écoutent pas ou font autre chose et cinq personnes sur dix trouvent que les chats ou mails ont parfois un ton trop informel. « Il faut traiter le sujet à l’heure où le télétravail se développe et induit beaucoup plus d’usages des outils numériques » analyse Christophe NGUYEN

Depuis le début de cette crise, le télétravail est un défi pout les managers, pour 70% d’entre eux, le management en télétravail est plus difficile qu’en présentiel. Un télétravailleur sur deux estime que le management ne se préoccupe que du résultat avec la sensation de devenir des « machine à produire », qu’ils doivent davantage prouver leur efficacité qu’en présentiel, et font plus de reporting. 47% sentent que leur présence et connexion aux bons horaires sont contrôlées par les outils numériques (diode etc…). Tous ces sujets sont facteurs de risque pour la santé psychologique. En fin de compte, 77% pensent que le style de management de leur entreprise doit changer pour s’adapter au télétravail.

« Le présentéisme existe à distance aussi (reporting, contrôle…). La demande des salariés de faire évoluer le style de management se confrontent à de réelles difficultés organisationnelles et managériales. L’accompagnement de cette évolution ne se fera pas uniquement par la signature d’accord sociaux. Une évolution culturelle est nécessaire pour éviter les problèmes de santé psychologique » poursuit Christophe NGUYEN

Résilience psychologique et nouvelles attentes des salariés

La crise confirme qu’elle crée de la croissance post-traumatique et que par voie de conséquence les attentes et les investissements des salariés évoluent nettement : 61% des salariés font ainsi preuve de résilience[3] (+ 8). « Cette crise est longue et diffuse, elle engendrera inévitablement des changements mentaux majeurs afin de protéger l’intégrité psychologique des salariés. C’est un processus inhérent à tout traumatisme, et cette pandémie en comporte tous les ingrédients. Prendre en compte ces évolutions notables, ce qui n’est pas aisé, sont une des clefs de réussite de la gestion de crise. Nous proposons de partager les résultats et le suivi. »

Méthodologie de l’étude :

La 4ème vague du Baromètre « Impact de la crise sanitaire sur la santé psychologique des salariés » OpinionWay pour Empreinte Humaine, a été réalisé en ligne. Les interviews ont été faites du 19 au 28 octobre auprès d’un échantillon de 2004 salariés représentatif et constitué selon la méthode des quotas, au regard des critères de sexe, d’âge, de secteurs d’activités, de nature d’employeur et de taille d’entreprises.

a mesure de la détresse psychologique se base sur un indicateur validé scientifiquement traduit en 25 langues dans des centaines de publications scientifiques. Il est un indicateur précoce d’atteinte à la santé mentale qui évalue la dépression et l’anxiété. Il s’agit d’un indicateur qui identifie, dans une population, les personnes qui sont plus à risque d’être atteintes de troubles mentaux sérieux.  Le questionnaire utilisé pour mesurer la résilience est également un questionnaire validé et qui a fait l’objet de nombreuses publications internationales. Le questionnaire du burn-out est utilisé par 80% de la publication scientifique internationale

Empreinte Humaine, un cabinet engagé pour la qualité de vie au travail

Créé en septembre 2012, le cabinet Empreinte Humaine est un des leaders de son secteur et rassemble des experts qui œuvrent à améliorer la qualité de vie au travail pour prévenir les risques psychosociaux. Couvrant les trois niveaux de prévention : primaire, secondaire et tertiaire, les interventions du cabinet visent à promouvoir trois domaines d’intervention :

  • Le premier domaine d’intervention est le bien-être des personnes qui comprend la prévention des risques psychosociaux et du stress au travail, la reconnaissance, la motivation et l’engagement.
  • Le second domaine se centre sur le bien-vivre des collaborateurs et des managers. Pour cela, les actions d’Empreinte Humaine portent sur le respect au travail, la gestion des conflits, le climat d’équipe et les relations interpersonnelles.
  • Le troisième domaine s’articule autour du bien-faire qui concentre les actions sur les processus de travail, la charge de travail, la clarté des rôles, la conduite des changements.

Empreinte Humaine dispose de toute l’expertise nécessaire ainsi que d’un réseau de consultants opérationnels sur toute la France et dans plus de 20 pays à travers le monde pour accompagner les entreprises et organismes publics lors de leurs actions en matière de qualité de vie au travail. Parmi ses innovations, Empreinte Humaine a développé HuCare© un programme de promotion de la santé individuelle pour ancrer et augmenter une culture de la sécurité psychologique dans les entreprises et Klimat©, un outil numérique innovant permettant d’anticiper et agir collectivement et en continu sur la qualité de vie au travail.

Contacts presse

Agence Ozinfos

Sothany TUM / Amine MOUSSAOUI

06 27 26 49 64 – empreintehumaine@ozinfos.com

[1] La détresse psychologique chevauche à la fois des symptômes de dépression et d’épuisement. Lorsqu’elle n’est pas traitée elle risque d’entrainer des problèmes de santé plus graves, tels que diverses maladies psychosomatiques, l’hypertension artérielle, différents troubles anxieux, la dépression sévère et des troubles addictifs.

[2] Le burnout est défini ici comme un syndrome d’épuisement émotionnel, de dépersonnalisation (dissociation émotionnelle…) et de réduction de l’accomplissement personnel

[3] Transformations psychologiques pour protéger sa santé psychologique

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